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échanges de commentaires contradictoires sur le Forum astrologie voyance du site aufeminin.com







COUR D'APPEL DE PARIS

14ème Chambre - Section A

ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2007


Madame B...B... dite MAUD KRISTEN

c/La Société AUFEMININ.COM


Vu l'appel interjeté par B.. B... dite MAUD KRISTEN de l'ordonnance rendue le 10 mai 2007 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris qui l'a déclarée irrecevable en sa demande de communication au titre de l'article 145 du nouveau code de procédure civile, a dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus et l'a condamnée à payer à la S.A. AUFEMININ.COM ( AUFEMININ ) la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, acte étant donné à cette dernière de ce qu'elle avait procédé au retrait des messages répondant au message envoyé par "laurel9 " (en réalité " laurel9 " ) le 20 février 2006 la concernant,


Vu les conclusions du 9 octobre 2007 par lesquelles Madame B... prie la cour, infirmant cette décision en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé, de dire que la société AUFEMININ a commis des actes de concurrence déloyale par dénigrement à son égard et la condamner au paiement de la somme de 15.000 euros à titre de provision sur l'indemnisation du préjudice subi, et sollicite la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,


Vu les conclusions signifiées le 27 septembre 2007 par la société AUFEMININ qui poursuit, outre la confirmation de l'ordonnance entreprise, l'allocation de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,




SUR CE


Considérant que, exposant qu'elle faisait l'objet d'une virulente campagne de dénigrement et de propos injurieux sur le forum de discussion du site internet " www.aufeminin.com " consacré à l'astrologie et à l'ésotérisme, Madame B.., qui exerce la voyance à titre professionnel sous le pseudonyme de MAUD KRISTEN , a déposé le 28 mars 2007 une plainte avec constitution de partie civile pour injures publiques envers un particulier puis, par acte du 5 avril 2007, assigné la société AUFEMININ , exploitant du site, devant le juge des référés qui, par la décision entreprise, a rejeté ses demandes ;


Considérant qu'au soutien de son appel Madame B.. fait valoir qu'en relayant des critiques subjectives et démesurées sur la qualité et le prix de ses prestations la société AUFEMININ , qui propose, entre autres, des services de voyance, a commis un acte de concurrence déloyale par dénigrement ; qu'elle lui reproche de ne pas avoir mis en oeuvre les moyens techniques dont elle dispose ( existence d'un modérateur et d'un moteur de recherche interne ) pour vérifier le contenu des messages dont l'objet est " MAUD KRISTEN " alors qu'à deux reprises ( juillet 2004, février 2006 ) elle lui avait demandé de supprimer de son forum des messages d'internautes qui l'avaient prise à partie, ce qu'avait fait AUFEMININ ;


Que la société AUFEMININ réplique que Madame B... ne caractérise pas la faute qu'elle lui impute alors que les propos visés, non univoques, ne sont que l'expression d'une opinion des internautes, qu'ils sont libres d'exprimer , et qu'en sa qualité de diffuseur d'un forum ( doté d'un modérateur a posteriori et non a priori ) elle ne peut, de même qu'un hébergeur de site, voir engager sa responsabilité civile dufait des informations stockées à l'initiative des utilisateurs du forum, et qu'elle a procédé promptement au retrait de tous les messages mettant en cause MAUD KRISTEN dès qu'elle en a été sollicitée ;


(...)


Considérant que constitue un acte de dénigrement toute action exercée auprès du public en vue de jeter le discrédit sur un concurrent en répandant à son propos ou au sujet de ses prestations des informations malveillantes ; qu'en l'espèce, si les propos relevés par Madame B... constituent effectivement une critique, parfois virulente, de la qualité et du prix de ses prestations, ils s'inscrivent dans le cadre d'une discussion entre internautes, qui ne sont pas tous du même avis, certains au contraire faisant part d'expériences positives (mimi 031059) affirmant l'honnêteté et la qualité de MAUD KRISTEN interrompant un entretien sans se faire payer lorsqu'un client ne se reconnaissait pas dans ce qu'elle lui disait de son passé et ayant évité à un autre deux catastrophes imprévisibles ( arma 20201 ), soutenant qu'elle n'est " ni nulle ni un escroc " ( lilibeth 751 ), ou critiquant les " médisances faciles " à son encontre ( voyance 12 ), notamment ;


Considérant qu'en présence de messages contradictoires sur la façon dont elle exerce son activité de voyante, Madame B.. ne peut prétendre avoir fait l'objet de campagnes de dénigrement de la part de la société AUFEMININ; que de surcroît, en sa qualité d'organisateur d'un forum doté d'un modérateur a posteriori, cette société ne peut voir engager sa responsabilité que dans les conditions applicables au fournisseur d'hébergement puisqu'elle assure le stockage direct des messages diffusés sans porter de regard préalable sur ceux-ci, ce qui exclut toute obligation générale de surveillance, et le seul fait qu'elle ait procédé au retrait des messages litigieux dès que Madame B.. lui en a fait la demande ne saurait valoir reconnaissance de responsabilité ;


Qu'il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance entreprise




- COMMENTAIRE -






La voyante Maud Kristen se plaignait de l'agressivité des internautes du site AUFEMININ à son égard. Déjà en juillet 2004 et février 2006, pour des faits similaires antérieurs elle demandait à 2 reprises au site de supprimer de son Forum les messages de prise à partie la concernant. Retraits effectifs.


En 2007, face à de nouvelles agressions, Mme Maud Kristen déposait une constitution de partie civile devant le juge pénal pour injures publiques contre un particulier, et assignait en référé devant le juge civil AUFEMININ pour concurrence déloyale et dénigrement. Prenant motif que AUFEMININ propose aussi des prestations payantes d'astrologie voyance. Il était en effet vraisemblable que les critiques proférées à son encontre par les internautes, sur ses prix et l'appréciation portée sur ses prestations, constituent des actes de ce chef. Toutefois, les textes des échanges ne ciblaient pas par comparaison des prestations offertes par AUFEMININ. Même si toutefois on ne peut exclure que la modération ait fait le nécessaire pour supprimer de tels messages.


Maud Kristen affrontait l'expression critique agressive d'internautes non nécessairement ses anciens clients. Avec la part de subjectivité incontrolable que comportent ces réactions. En tout état de cause il en résultait pour elle une souffrance dont elle demandait réparation.


La solution juridique à cette souffrance imposait au juge civil de rechercher tout d'abord si une faute avait été commise, puisqu'en application de l'article 1382 civil, tout fait quelconque de l'homme oblige à réparer. En l'espèce les fautes étaient constituées par la diffusion des opinions d'autrui. En ce cas la responsabilité est celle du directeur de publication. En l'espèce AUFEMININ expliquait assurer une surveillance à postériori, afin de se dégager des conséquences en terme de réparation. Une réponse insuffisante. Toutefois AUFEMININ faisait valoir que les opinions se balançaient en ce que des avis positifs étaient publiés, contrebalançant les critiques sur les prix et la mise en doute des compétences de Maud Kristen. Ce dernier argument, conforté par la production en pièces de ces messages suffit à convaincre le juge que AUFEMININ n'avait commis aucun acte de dénigrement à l'encontre de Maud Kristen, ni non plus de concurrence déloyale, puisqu'aucune opinion n'était privilégiée plus qu'une autre.


Maud Kristen était déboutée de ses demandes. Vraisemblablement en conçut-elle de la déception. La faute en revient à ses avocats. Les réseaux sociaux sont source de problèmes similaires et il convient d'analyser d'une part comment les messages sont déposés. D'autre part analyser les moyens de droit. Le dénigrement est un moyen juridique employé lorsque la nuisance s'avère malveillante. Cette malveillance s'analysant le plus souvent comme une action visant prendre de la clientèle à un concurrent afin de lui causer un préjudice financier. En matière de personne le dénigrement doit atteindre l'honneur et la considération, et l'on verse alors vers la diffamation lorsque les actes portent atteinte à la réputation.


Dans le cas de Maud Kristen, quelque soit sa renommée dénigrer une voyante constitue un argument peu vraisemblable pour un juge, s'agissant d'une activité illicite. Le magistrat cherchera d'abord si une faute est commise, et laquelle. Le différent se déplace alors vers le droit du commerce électronique, et celui des publications, d'où la nécessité de s'intéresser à la LCEN et à son article 6. Vraisemblablement Maud Kristen aurait du commencer par là au lieu d'assigner en référé. Réclamer un droit de réponse. Assigner devant le juge pénal ensuite afin de faire constater le refus en cas de besoin. Faire amender AUFEMININ. Rien de tout cela ne fut fait. Maud Kristen perdit sa chance.


L'affaire Maud Kristen AUFEMININ intervint avant la décision prise depuis 2015 par plusieurs supports de presse de supprimer les commentaires et les forums sur leurs sites, à raison du coût des problèmes suscités par ce type de services, notamment sur le plan juridique.


En la matière il convient de relire une décision classique dont les effets s'exercent, sans toutefois refléter le point de vue du public. L'arrêt INAD cassation deuxième chambre civile 24 avril 2003.


L'INAD -institut national des arts divinatoires- s'était fait connaître dans les années 1990 par un arrêt 3615 INAD, à propos de sa page "les voyants qu'on peut ne pas consulter". L'INAD fut poursuivie ensuite en justice par la société de fausse voyance Vanessor, pour des appréciations relatives aux prestations de cette entreprise.


La Cour de Cassation rendait un arrêt le 24 avril 2003 dont un des attendus retient l'attention :

"Attendu que les appréciations, même excessives, touchant les produits, les services ou les prestations d'une entreprise industrielle ou commerciale sont libres, dès lors qu'elles ne concernent pas la personne physique ou morale ;"


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Institut national des arts divinatoires (l'INAD) exploite un service minitel, à l'adresse 3617 INAD comportant diverses rubriques, dont un "guide pratique du parfait charlatan", une "sélection INAD des professionnels", et une liste "des professionnels que l'on peut ne pas consulter" ; que se plaignant d'être mentionnée sur cette liste, la société Vanessor a fait assigner devant le tribunal de grande instance, en réparation d'un dénigrement fautif, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, l'INAD, et la société Pictures on Line (la société), dont le centre serveur hébergeait le service télétel de l'INAD ; que le Tribunal a condamné in solidum l'INAD et la société à verser une somme, à titre de dommages-intérêts, à la société Vanessor, a ordonné l'omission de celle-ci de la liste litigieuse, et la publication de la décision dans un organe de presse ;


Qu'en déduisant de ces constatations et énonciations que le dénigrement outrepassait le droit de libre critique, alors que la réputation de la société Vanessor n'était pas elle-même atteinte par la publication incriminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;


La cour de cassation reconnaissait la liberté de critiquer les prestations des astrologues, faux voyants et autres non sérieux.


φclaude thebault 29/03/2016
















®

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